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Actu Droit Social | Contentieux de la clause de non-concurrence : à chaque demande, son propre régime de prescription

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Les actions prud’homales sont soumises à plusieurs délais de prescription, les plus courants en pratique étant ceux :

  • de deux ans en matière d’action portant sur l'exécution du contrat de travail ;

  • de douze mois en matière d’action portant sur la rupture du contrat de travail ;

  • de trois ans en matière d'action en paiement ou en répétition du salaire.

 

Afin de déterminer lequel de ces délais de prescription est applicable, la Cour de cassation impose de raisonner par rapport à la nature de la demande. Celle-ci a en effet posé un principe selon lequel « la durée de la prescription est déterminée par la nature de la créance invoquée » (Cass. Soc. 30 juin 2021, n° 18-23.932).

 

Une même procédure prud’homale peut donc entrainer l’application de plusieurs délais de prescription différents.

Tel était le cas dans une récente affaire relative à la mise en œuvre d’une clause de non-concurrence (Cass. Soc. 2 octobre 2024, n° 23-12.844).

 

Cet arrêt de la Cour de cassation a pour principal intérêt de préciser, outre les délais de prescription applicables aux diverses demandes pouvant survenir dans un contentieux relatif à une clause de non-concurrence, les points de départ de ces différents délais.

 

En l’espèce, un salarié a démissionné le 23 octobre 2014, la relation de travail prenant fin à l’issue de son préavis, le 26 février 2015.

 

Son contrat de travail stipulait une clause de non-concurrence d’une durée de 2 ans et une clause de non-sollicitation de clientèle, l’une et l’autre ne comportant aucune contrepartie financière.

 

Après l’échec d’une tentative de conciliation initiée le 9 septembre 2015 et arrivée à terme 6 mois plus tard, le salarié a saisi la juridiction prud’homale le 26 février 2018.

 

Dans ce cadre, il sollicitait :

  • à titre principal, la nullité de la clause de non-concurrence pour défaut de contrepartie financière et l’octroi de dommages et intérêts subséquents ;

  • à titre subsidiaire, le paiement d’une contrepartie financière et l’octroi de dommages-intérêts pour défaut d’application de la clause et atteinte à la liberté du travail.

 

La Cour d’appel a rejeté ces trois demandes, selon elle, prescrites et donc irrecevables.

 

Saisie d’un pourvoi du salarié, la Cour de cassation a rendu une décision de cassation partielle, toute en nuances.

 

Aux termes d’un arrêt détaillé, celle-ci a jugé que :

 

1.    L’action en nullité de la clause de non-concurrence et la demande de dommages et intérêts subséquente sont soumises au délai de prescription de deux ans de l’article L1471-1 alinéa 1er du code du travail.

 

La Cour de cassation a précisé à cette occasion que ce délai court à compter de la mise en œuvre de la clause de non-concurrence, c’est-à-dire à partir de la rupture effective du contrat de travail, soit en l’espèce, du 26 février 2015.

 

Ainsi, malgré la tentative de conciliation qui a suspendu pendant 6 mois le délai de prescription, la demande principale du salarié était déjà prescrite en date du 26 février 2018, le délai pour agir ayant expiré le 26 août 2017.

 

2.    L’action visant au paiement de la contrepartie financière obéit au délai de prescription triennale de l’article L3245-1 du code du travail, celui-ci courant à compter de l’exigibilité de chaque échéance mensuelle prise isolément.

 

Ainsi, lorsque la contrepartie financière de l’obligation de non-concurrence prend la forme du versement d’une indemnité mensuelle, chaque mensualité est soumise à un délai de prescription triennale distinct. Dit autrement, le point de départ du délai de prescription est glissant.

 

Il résulte de cette règle rendue sur le fondement de l’article L3242-1 du code du travail, qu’en l’espèce, certaines de ces mensualités n’étaient pas encore couvertes par la prescription en date du 26 février 2018, d’où la décision de cassation partielle.

 

3.    L’action en dommages et intérêts pour inexécution de la clause et atteinte à la liberté du travail du salarié est régie par le délai de prescription biennale de l’article L1471-1 alinéa 1er du code du travail, ce délai se décomptant à partir du moment où le salarié cesse d’être astreint à l’obligation de non-concurrence, et non pas à compter de la rupture du contrat de travail comme l’avait jugé la Cour d’appel.

 

La Cour de cassation a donc censuré les juges du fond pour avoir jugé la demande prescrite alors que le délai de prescription de 2 ans n’avait commencé à courir qu’à compter du 26 février 2017.

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